Fin de journée ....?

" Un hamburger pour la huit ! "

Une jeune femme s'approcha du comptoir et accrocha un papier au tableau de commande. Ne prenant pas le temps de s'arreter elle empoigna les deux assiettes qui gisaient là. Sur le papier à côté on pouvait lire les deux commandes et dans le coin inférieur gauche un gros trois. Le sourire aux lèvres elle s'approcha de la table en question et y déposa devant le couple les deux plats.

" Voilà pour vous! Une salade de saison pour madame et un plat du jour pour monsieur. Bon appétit! "

Après un grand sourire commercial elle se retourna vers le reste de la salle et avisa une jeune Neoterrienne qui l'appelait. Elle s'y dirigea aussitôt et vit l'assiette vide contenant les quelques derniers vestiges du gâteau au chocolat qui s'était trouvé là. Celle qui l'avait demandé voulait l'addition et la jeune fille repartit en lui disant qu'elle arrivait. Retournant au comptoir elle avisa sa mère aux fourneaux qui la regardait fatiguée.

" Miyouki la commande de la table huit sera prête dans cinq minutes.... Y en a-t-il d'autre? "

" Non c'est les derniers clients de la soirée semblerait-il. "

La vielle dame soupira et se laissa aller contre le lévier en retirant doucement son tablier de cuisine. Elle avait les traits tirés et des rides marquaient ce front qui avait si durement travaillé. L'une de ses articulations craqua et elle continua.

" Bien je pars me reposer après celle-ci. Si un quelque client arrive encore tu pourras t'en charger? "

Miyouki sourit gentiment à sa mère dont la santé commençait à l'inquiéter avec l'âge.

" Oui ne t'en fait pas. "

Prenant ce pourquoi elle était venue, elle retourna à la table de la jeune fille. Il était près de minuit et il était rare d'avoir du monde après cette heure passée. En réalité les clients ne s'attardaient pas tard le soir par les temps qui couraient et le restaurant fermait souvent aux alentours de 23h en semaine. Mais on était samedi et de ce fait ce n'était pas vraiment une surprise. Après avoir rendu sa monnaie à la jeune fille et lui avoir souhaité une bonne fin de soirée elle débarrassa la table, amenant le couvert aux cuisines. En ressortant elle vit la commande qui attendait d'être servie. Le même manège dura ainsi jusqu'à une heure du matin quand le dernier client sortit. Elle se laissa alors choir sur une chaise après avoir débarrassé la dernière table. Miyouki restait là à regarder le plafond, la force lui manquant pour la vaisselle. Elle n'avait même plus assez d'énergie pour fermer le restaurant et restait simplement assise là appréciant le calme après une journée de travail quand elle entendit la porte s'ouvrir dans son dos...

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Shinoe marchait. Pour aller où? Il ne savait pas. Il marchait, un point c'est tout, sans but précis mis à part celui de trouver un lit. Cette nuit, la température devait descendre bien bas : il neigeait. Même s'il était moins sensible que les autres au froid, Shinoe grelottait, les lèvres bleuies, en marchant. Une couche de neige recouvrait ses épaules couvertes par une simple veste, et sa tête non protégée, à la merci du froid. Des enfants se trouvaient sous des cartons, tentant tant bien que mal de se protéger. Shinoe les regarda, ils ne devaient avoir guère plus que dix ans. Encore des enfants victimes de la guerre, pensa-t-il. S'il avait pu leur donner quoi que ce soit pour les aider, il l'aurait fait. Mais il n'avait pas vraiment plus qu'eux.

Voilà trois jours qu'il errait dans la ville. Enfin, trois jours, pas vraiment, puisqu'il rentrait chez lui pour prendre des douches. Vous me demanderez quelle est l'utilité? Je vous répondrai que depuis la mort de sa mère, Shinoe souffre d'insomnie. Pour faire passer, il erre plusieurs jours dans la ville et finit par s'écrouler quelque part de fatigue, n'ayant pas confiance en la médecine humaine. Et puis, la médecine marche-t-elle face à un demi-vampire?

Des maisons, en ruine. Des maisons, détruites. Shinoe regardait ce paysage dévasté avec une grimace. Les deux groupes étaient encore passés par là. Ou alors juste un seul qui avait pris plaisirs à détruire tout ce qu'il pouvait trouver ici. Les cadavres d'innocents devaient encore pourir sous ces charpentes effondrées. En y pensant, Shinoe eut un frisson de terreur et de dégoût qui lui parcourut la colonne vertébrale. S'enfuir, vite. Il commença à courir, prit d'un élan de lâcheté, cette lâcheté qui le consumait depuis qu'elle était partie. S'éloigner, s'allonger dans un coin, dormir. Dormir et oublier, c'est ce qu'il voulait. Mais hélas, même dans ses rêves, ses fantômes le poursuivaient.

Il finit par s'arrêter de courir. Il reprit sa respiration, inspira et expira une dizaine de fois en attendant que son rythme cardiaque redevienne normal. Il avait fuit, encore une fois. Il marcha. Ici, les maisons se faisaient un peu plus rares, remplacées par de modestes immeubles. Puis vint une auberge. Restau'-hôtel le machin. Shinoe sentait le poid de ses journées sans dormir lui peser sur le crâne, les jambes et les bras. Il avança vers elle, poussa lourdement la porte.

Une lumière assez puissante par rapport à la noirceur du ciel le força à fermer à moitié les yeux, le temps que ses prunelles qui n'avaient pas vu de "jour" depuis quelques temps se réhabituent. Une jeune femme était assise seule dans la pièce. Il la regarda et comprit d'emblée qu'elle était fatiguée, à cause de ses traits tirés et de son corps courbé, comme s'il ne se supportait plus. Shinoe ne devait pas être en meilleur état. Ses cheveux étaient trempés par la neige, ses lèvres étaient bleuies, deux cernes violets se dessinaient sous ses yeux, il était blanc comme un cachet.

- "Je dérange?"

Sa voix était rauque et grave, contrastant parfaitement avec son visage doux et enfantin, malgré la fatigue et l'épuisement dont il était victime à présent.

Miyouki se retourna pour voir qui pouvait encore venir à cette heure tardive en pleine nuit. Un jeune homme apparut alors dans l'encadrement de la porte. De la où elle se trouvait la lumière de la pièce éclairait les flocons qui tombaient dehors et les traversaient de sorte à leur donner l'impression de luire rendant la scène étrangement irréelle à ses yeux. Elle secoua légèrement la tête se disant qu'elle devait décidément être vraiment fatiguée. Elle s'intéressa alors au nouveau venu. Il devait errer depuis déjà assez longtemps vu l'état dans lequel il était. La morsure du froid était visible sur son visage. Il avait l'air exténué et malade.

La jeune fille se leva rapidement et afficha son habituel sourire qu'elle réservait au client et essuya par réflexe sur un court tablier noir qui pendait sur son pantalon noir et qui était maintenu par une ceinture rouge vif. Alors que le jeune homme demandait si il dérangeait elle se recoiffa rapidement rangeant les quelques mèches rebelles qui tombaient sur son visage derrière un ruban noir qui laissait sa chevelure rousse libre. Elle repoussa la chaise sur laquelle elle se tenait à l'instant tout en répondant.

" Vous ne dérangez pas du tout. Veuillez m'excuser je ne m'attendais pas à encore avoir de la visite. Que puis-je faire pour vous? "

Elle l'invita d'un mouvement de la main accompagné d'un sourire charmeur à entrer et se mettre au chaud. Elle referma doucement la porte derrière ce nouveau client en jetant encore rapidement un dernier coup d'œil au dehors. La rue était sombre et la seule lumière provenait de leur restaurant. Elle s'approcha du nouveau venu toute sourire et lui proposa de la suivre au comptoir et là alla chercher une couverture de laine qu'elle lui tendit pour le cas où il chercherait à se réchauffer. Il était de son devoir après tout de prendre soin de ses clients sinon ils finiraient rapidement la clé sous la porte. Miyouki ne pouvait cependant s'empêcher de se demander d'où venait ce jeune inconnu et ce qui l'amenait à se promener si tard le soir et par ce froid.

" Tenez ça vous réchauffera dans l'immédiat. "

Voyant ses lèvres bleuies elle se dit qu'une boisson chaude ne lui ferait pas trop de mal. Il ne semblait pas plus âgé qu'elle où alors de peu. Il avait peut-être fugué qui sait. Ça ne l'étonnerait pas vraiment car nombreux était les jeunes fugueurs qu'on avait retrouvé un matin égorgé et dépouillé par ici. Avec la saison froide qui arrivait les gens perdaient souvent toute considération pour la vie ou la communauté et seul passait l'individualisme et son propre instinct de survie. Mais même cela on ne pouvait le leur reprocher. Les temps était durs et Miyouki avait beaucoup de chance de vivre avec sa mère au rest'hôtel. Elle laissa s'échapper un petit sourire de compassion sur ses lèvres pour le garçon avant de le transformer rapidement en celui qu'elle prônait d'habitude.

" Un peu de thé vous plairait-il? "

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Un sourire charmeur, des attitudes on ne peut plus normales. C'est tout ce qu'il voyait. La jeune serveuse était la copie conforme de l'hôte idéale, celle qui vous sert des faux-sourires à longueur de journée pour pouvoir gagner sa vie. Un sourire, une boisson chaude, et en échange vous donniez de l'argent. Vous aviez des femmes qui couchaient avec vous en échange d'un peu de tune, et vous aviez des femmes et des hommes qui vous souriaient et vous offraient une semie-hospitalité en échange d'argent. Super la comparaison, n'est-ce pas? Eh bien, dans l'esprit de Shinoe, les deux choses étaient pareilles. "Je t'offre un peu de plaisir, en échange tu me payes" ; "Je te donne quelque chose à boire et un sourire commercial, en échange tu me payes".

Shinoe dévisageait la jeune femme tout en réfléchissant à ce nouveau débat qui venait de naître dans son esprit. Il la détaillait de haut en bas, comme toujours à chaque fois qu'il rencontrait quelqu'un. La pauvre, elle devait le trouver étrange. Mais Shinoe s'en foutait comme de l'an 600 ou de son premier cheveux de ce qu'elle pouvait penser de lui. Elle se pliait en quatre pour savoir ce qu'il voulait, ce dont il avait besoin et tout le tralala. Shinoe ne s'était même pas apperçu qu'il avait si froid que ça. Il savait qu'il grelottait, mais il n'avait pas remarqué que ses orteils ne répondaient plus. Autant dire qu'il faisait réellement un froid de canard dehors... Elle lui passa une couverture. Il la regarda, droit dans les yeux et eut une expression qui ressemblait à un semblant de sourire. Cete expression signifiait quelque chose du genre de "merci pour ta pitié". Il s'enroula dans la couverture, rentrant quasiment tout son corps entié à l'intérieur. Elle lui posait des questions et sans attendre la réponse essayait d'aller plus vite que lui. Du coup, il se retrouva avec sa couverture et une tasse de thé sans même avoir ouvert la bouche.

- "Merci beaucoup."

Des phrases simples, courtes, deux mots allignés à chaque fois. C'est ainsi qu'étaient construites un grand nombres de phrases que vous pouviez entendre Shinoe. Il continuait de la regarder faire, comme si ça l'épatait de voir quelqu'un travailler comme ça pour gagner sa vie. Sauf qu'en fait, ça l'épatait pas du tout. Il posa un coude sur le contoir et appuya sa tête contre sa main pour atténuer le mal de crâne dont il était à présent victime.

- "Excusez moi mais... Vous n'auriez pas une chambre pour que je puisse y passer la nuit?"

Question prononcée avec presque un murmure. Heureusement que sa voix était grave, sinon elle n'aurait sans doute pas entendu. De toutes manières, Shinoe ne parlait jamais fort. Sauf quand il hurlait sur quelqu'un, mais dans ces cas là, mieux vaut ne pas être là. Sait-on jamais, Shinoe serait bien capable de vous hurler dessus aussi. Même s'il est relativement calme, lorsqu'il pète un plomb, il ne le pète pas qu'à moitié.

Le jeune homme ne parlait pas beaucoup. Elle lui avait simplement tout mis dans les mains. Elle se demandait si c'était le froid ou alors son comportement naturel envers les gens. Surtout qu'elle lui était totalement inconnue. Elle lui avait tendue une tasse de thé toujours sans attendre de réponse. Miyouki était peut-être un peu trop "vive" mais elle en avait tellement l'habitude que résultat elle ne s'en rendait plus compte. Dans son métier les mots d'odre étaient rapidité et efficacité après tout. Elle avait opter pour un thé à la camomille, un thé plutôt relaxant parfait pour calmer les nerfs ou pour se détendre après une bonne journée de marche ou de travail. Après cela elle chercha une seconde tasse et se versa la même chose que ce qu'elle avait donné au jeune homme.

Miyouki revînt dans la salle et s'installa face au nouvel arrivant de l'autre côté du comptoire. Elle posa doucement la tasse sur le rebord de bois et enlaça la tasse chaude de ses doigts profitant pleinement de la chaleur qui s'en propageait. La jeune fille oublia temporairement qu'elle n'était plus seule et se laissa aller à fermer les yeux et soupira tout doucement de sorte que son vis-à-vis ne puisse l'entendre. Un sourire de confort ejecta l'autre de ses lèvres et en pris la place. Elle réouvrit les yeux au moment où elle entendit la voix du jeune homme la remercier. Elle lui sourit gentiment et répondit d'un signe de tête qui signifiait quelque chose du genre "Ce n'est rien" ou "C'etait un plaisir".

Le jeune homme vînt alors s'appuyer sur le comptoire face à elle posant sa tête dans l'une de ses mains. Miyouki profita de cet instant de calme pour boire quelques gorgées du thé qu'elle venait de préparer. Elle ne tarderait pas à aller se coucher après cela. Celui-ci lui demanda presque en un mumure si elle avait encore une chambre de libre pour cette nuit. Elle réfléchit un instant à sa requête. Ils avaient eu beaucoup de demande ce soir là ou un peu plus tôt dans la semaine. Elle posa sa tasse légèrement sur le côté et se baissa pour chercher un gros livre qui servait de registre. Elle le posa légèrement à l'écart pour ne pas gêner le jeune homme et l'ouvrit en cherchant la date de ce jour ci. Elle parcourut rapidement la page des yeux en suivant son index pointé qui carressait délicatement la feuille.

" Hum... Je suis désolé la dernière chambre a été prise un peu plus tôt dans la soirée. "

Le prochaine hôtel était assez loin d'ici. Miyouki n'allait pas le laisser retourner dehors par ce froid chercher dans le noir la prochaine bâtisse qui pourrait l'accueillir. L'installation électrique n'était pas encore au point dans cette partie de la ville. A part le lampadaire que sa mère avait fait installer devant chez eux il n'y en avait aucun avant une bonne centaine de mètres. Sa mère n'apprécierait surement pas mais elle dormait maintenant et à bien profondemment la connaissant.

" Mais on peut toujours s'arranger. Si tu veux, tu peux dormir avec moi cette nuit. Ma chambre est assez grande pour deux personnes. "

Elle referma le registre et le rangea à nouveau sous le comptoire. Rien ne serrait noter officiellement nul part. Après tout ce n'était pas vraiment conforme mais ce qui était "interdit" au client ne l'était pas pour les amis. Miyouki expliquait ainsi son geste et tant pis si ça ne suffisait pas à sa mère, c'était sa logique. Mais surtout elle n'y pensait pas le moins du monde à cet instant. Elle reprit sa tasse et la termina avant que le thé ne refroidisse et reporta son attention vers le jene homme.

" Et ai-je le droit de te demander ton nom? "

Elle se demandait si elle n'allait pas trop loin en passant au tutoiement mais qui vivra, verra et elle avait toujours fonctionné ainsi.

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Shinoe s'étouffa. Sans rire, il s'étouffa avec son thé chaud, recula de quelques centimètres tout en se donnant de nombreux coups sur le torse pour faire passer le thé. Et le choc aussi, par la même occasion. Quelles étaient les raisons de son étouffement? Eh bien, la jeune fille avait commencé par lui dire qu'il n'y avait plus de chambre, pour ensuite lui proposer de venir dans sa chambre à elle ! Avouons les choses tout de suite, Shinoe avait déjà dormi avec une fille. Pas qu'une d'ailleurs, mais ne vous méprenez pas, il n'est pas coureur de jupons : trop indifférent aux autres pour ça. Mais, d'un coup comme ça alors qu'il ne s'y attendait pas... ça fait bizarre quand même ! Il arrêta de tousser d'un coup, et leva la tête vers la jeune femme qui lui avait demandé son prénom.

- "Shinoe Nakagawa. Et v...toi?"

Un déshabitué du tutoiement le pauvre Shinoe. N'empêche, même si sa première réponse aurait été un "non" clair net et précis, il commençait à se demander s'il n'allait pas accepter. Rien de pervers, je vous rassure, juste qu'il n'avait pas envie de sortir dehors encore une fois. Et puis, vue la tête de la jeune femme, il doutait quand même qu'elle soit en train de lui proposer une coucherie. Juste un hébergement pour un pauvre garçon gelé jusqu'aux os. Pour le réchauffer... Ne nous égarons pas, celà restait dans l'ordre du simple prétage de chambre. Enfin... je crois.

Shinoe dut se forcer pour ne pas avoir les idées placées ailleurs et au mauvais endroit. Oui, bon, c'était un garçon que diable, il avait le droit ! Mais il était trop fatigué pour tenter quoi que ce soit. Cependant, une chose le mettait sur ses gardes. N'oubliez pas que le jeune homme est à moitié humain, à moitié vampire. Si ses pulsions vampiresques se réveillaient après des années d'absence durant la nuit? Oui oui, bon, il restait tout de même écoeuré à l'idée d'éventrer cette jeune femme pour la vider de son sang mais... Sait-on jamais, il préférait être prudent.

- "P... pour la chambre.. euh... Ouais je veux bien..."

Le timide jeune homme regardait dans sa tasse de thé, un peu géné. Faut dire qu'elle y avait été un peu directement avec lui, le pauvre... Enfin bref, on va mettre ça sur le compte du froid et du fait qu'il n'avait pas dormi depuis quelques temps et que ceci fait que cela est. Vous avez rien compris à ce que je viens de dire? Nan? Pas grave, j'ai pas envie de m'expliquer. Il hésita un instant avant de se décider de poser quelques questions... Quand même.

- "Excuse moi Miyouki mais, tu as quel âge ? T'es toute seule ici? T'es pas mariée ?"

Il avait prononcé le "t'es pas mariée" avec un soupçon d'ironie dans la voix, avec le regard qui allait avec, ce regard qui illuminait son visage d'une certaine malice et intelligence à chaque fois qu'il faisait ça.

- "Désolé pour mes questions étranges hein, mon but est pas de te faire peur."

Il lui sourit, doucement, signe qu'il ne se renfermait pas sur lui-même face à cette personne qui ne lui semblait pas horrible à supporter et peut-être, même, d'une plutôt bonne compagnie.

Miyouki s'appuyait sur ses avant-bras, la tête doucement posée au creux de ses mains, et regardait le jeune homme s'étouffer avec son thé, amusée. Elle ne pensait pas le choquer à ce point là. Un sourire se dessina sur ses lèvres, un vrai pour une fois. Elle lui portait un regard qu'on pourrait qualifier de doux mais sans l'être réellement - oui elle est douée -... Personne ne saurait dire sa signification, non à moins de la connaître parfaitement. Sa propre mère avait depuis longtemps abandonné, c'était dire. Elle passa l'une de ses mains sous le comptoir à la recherche d'une serviette et la fit glisser jusqu'au jeune homme, ou plutôt à Shinoe maintenant qu'elle connaissait son nom. Il n'avait pas l'air à l'aise avec le tutoiement mais il l'employait tout de même. Nice game! Miyouki se redressa alors, libérant sa main restante, et la posa sur le comptoir de bois en tendant l'autre à son compagnon.

" Miyouki Kuzumi. Ravie de faire ta connaissance Shinoe! "

Au moins il avait accepté sa propositon de dormir avec elle ce soir même si il en avait paru très gêné. Elle se demandait d'ailleurs bien pourquoi. Ce n'était que dormir avec une parfaite inconnue, dans le même lit, une... une... Elle rit doucement pour elle-même. C'est bon elle avait compris. Elle comprenait maintenant sa gêne. Elle aurait peut-être dû y penser plus tôt. Enfin il devait bien se douter qu'elle n'était pas de ce genre de fille, ou du moins l'espérait-elle.

Il y eût un moment de silence gêné qui ne dura surement que quelques secondes mais ça lui parut comme une éternité - oui c'est souvent comme ça dans ces moments là me direz vous -. Elle allait prendre la parole pour s'expliquer et lui dire que cette proposition n'était absolument pas dans le but d'un assouvissement sexuel ardent et personnel - exactement ce qu'il ne vaut mieux pas dire à ce moment précis - quand celui-ci parla le premier, fort heureusement. Les premières questions, elle les comprit sans problèmes. Mais la dernière... Etait-elle marriée? Si cela était elle n'en savait rien. Elle haussa les sourcils et se demandait si il plaisantait là, ou s'il était parfaitement sérieux. Avait-elle la tête d'une femme marriée? Excellente question qu'elle tâcherait d'élucider plus tard. Dans tous les cas elle dû faire une tête qui soit inspirait quelque peu la pitié, soit qui avait l'air tellement sous le choc et ahuri qu'il s'excusa d'avoir posé toutes ces questions et de lui avoir fait peur. Elle remis ses sourcils en place - non je vous jure qu'ils n'étaient pas partis se promener dieu ne sait où (u.u) - et lui sourit, gênée.

" Non non ne t'en fais pas. Je réfléchissais juste à quelque chose. Eh oui... Ca m'arrive aussi de temps en temps. Donc pour te répondre... hum... J'ai 17ans. Je ne m'occupe pas seule de cet établissement mais avec ma mère - elle est déjà montée se coucher et ne se réveillera pas avant demain matin maintenant -. "

Remarquant que le jeune homme avait avait fini sa tasse de thé, elle lui proposa de le débarrasser et de s'en occuper. Elle emporta alors les deux tasses dans la cuisine laissant Shinoe seul dans la salle pendant cinq minutes le temps de finir ce qu'elle avait à faire. Enfin elle avait laissé la porte de liaison ouverte. Elle ouvrit l'eau et d'un mouvement rapide et efficace du poignet, seulement armée d'une éponge moussante - vous remarquerez la maitrise remarquable de cet art si magnifique et méconnu aussi appelé 'faire la vaisselle' -, elle récurra les tasses avant de les poser à l'envers sur le séchoir. Elles seront prêtes à l'emploie dès demain matin. Elle retourna, en fermant la lumière et la porte derrière elle, dans la salle et passa un dernier et rapide coup de chiffon sur le comptoir avant d'enlever son tablier et d'accrocher celui-ci et le tochon à un mur. Elle contourna finalement le comptoir pour aller se mettre à côté de Shinoe - n'allez rien vous imaginer vous là -.

" Et toi quel âges as-tu? Cela t'arrives souvent de te ballader dans ce coin de la ville tout seul en pleine nuit? Et... Es-tu marrié? "

Elle reprit cette dernière question sur le ton de la plaisanterie en le regardant d'un air intéressé - non mais à ce qu'il va dire voyons -.

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Il la regarda se poser intérieurement des questions par rapport à ses questions avec un sourire en coin. La jeune fille l'amusait et le détendait ; c'était une personne agréable. Par ailleurs, la grimace qu'elle faisait à ce moment-là était plus que risible et il dut faire un énorme effort pour ne pas s'écrouler de rire, et cela se voyait sur son visage étrangement contracté. Elle se reprit, épargnant à Shinoe d'étouffer par manque d'oxygène, et lui répondit avant de lui retourner ses questions. Elle avait 17 ans, s'appelait Miyouki, et elle vivait seule ici avec sa génitrice. Soit. Il attendit qu'il revienne de son escapade dans la cuisine pour lui répondre, et dans les règles de l'art Shinoenien.

« Alors, j'ai 18 ans, je me balade seul en ville lorsque je veux m'occuper l'esprit. Je suis marié divorcé avec deux enfants que j'ai mis dans le congélateur dès la naissance dans le but de les tuer parce que... J'aime pas ça les gosses. »

Il se douta bien que sa blague - oui oui, c'en était une -, ne serait pas forcément bien comprise, puisqu'il avait dit cela avec naturel et avec cette indifférence qui lui était bien habituelle. Aussi, ajouta-t-il avec un sourire en coin :

« Non, je ne suis ni marié ni divorcé et je n'ai jamais eu d'enfants, ne t'inquiète pas. »

Je vous l'accorde, Shinoe avait un humour bien particulier. D'ailleurs, certaines personnes ne faisaient pas la différence entre ses blagues et ses vérités. Quand je dis "certaines personnes", je parle de beaucoup, beaucoup de personnes. Il jeta un coup d'oeil à sa montre. Il était tard. Son regard passa sur Miyouki qu'il étudia et détailla sous presque tous les angles - ceux qu'il avait l'occasion de voir du moins - de haut en bas et de bas en haut. Son regard s'attarda sur les yeux de la jeune femme, un mélange de noisette et de rouge, absolument magnifique. Il se doutait bien que son regard devait gêner la jeune Miyouki - en tous cas, ce genre de choses semblent gêner la plupart des filles - mais il ne pouvait en faire autrement.

C'est fou comme la fatigue vous quitte rapidement lorsque vous êtes en bonne compagnie. Non, pas en bonne compagnie dans le sens où vous le prendrez, disons juste que c'était une jolie serveuse avec de belles fo... Laissez tomber. Ne le prenez pas pour un pervers, non non, juste qu'elle était assez jolie et que... Vous connaissez les hommes. Et puis, dans ce genre de circonstances, il est presque impossible de demander à un homme de faire en sorte de se tenir correctement. Pendant que Shinoe s'attardait à ses idées déplacée, il faisait en sorte de ne pas croiser le regard de la jeune fille, de peur qu'elle ne se doute de quelque chose. Rassurez-vous, il ne la violerait pas, il s'assurait que les femmes veuillent bien avant de faire la moindre chose que la pudeur ici n'empêche de mentionner.

Si vous aviez douté un jour sur la virilité de Shinoe, soyez rassurés, de ce côté là il est tout à fait normal. En se giflant intérieurement, il arrêta de se faire des films tous plus osés les uns que les autres et changea presque entièrement de sujet, histoire de ne plus y penser.

« C'est pas ennuyant pour toi de vivre ici seule avec ta mère et quelques personnes s'aventurant dans ce quartier assez reculé? »

Miyouki réfléchissait - si si je vous jure que c'est possible -. Non en réalité elle tentait d'assimiler ce que venait de lui dire Shinoe. Marié, divorcé, père et congélateur. Quelle redoutable équation. Aller savoir pourquoi mais la première chose à laquelle elle pensa était s'il avait divorcé avant ou après l'accouchement. Enfin après serait peut-être plus logique. Mais il était quand même jeune. Père a 18 ans... Oh bien sûr il y avait bien la fille des Vendôme qui avait accouché à 15 ans mais c'était pas la même chose. Enfin croyait-elle. Elle était pas marriée quand elle a accouché. Et quand elle fût mise enceinte par la même occasion. Et les enfants mis dans le congélateur dès la naissance... C'était absurde. On avait déjà du mal à tout caser dans le réfrigérateur alors avec deux gamins en plus. Quand soudain elle eut une illumination. Si elle avait été un personnages de séries enfantines de dessins animés elle aurait une espèce d'ampoule qui se serait allumée au-dessus de sa tête. Eh oui elle venait de tirer la splendide conclusion qu'il devait faire drôlement froid dans le congélateur! - non rassurez vous c'est pas tous les jours comme ça -. Enfin de fil en aguille elle comprit qu'ils étaient morts. Sa tête changea alors radicalement de faciès. Il y a environ trente secondes on aurait pu voir sa mine de reflexion - oui ça existe réflechissez! -, c'est-à-dire les sourcils légèrement froncés, la bouche qui s'avançait un peu en une petite moue comique et les yeux perdus dans le vague à droite - ne me demandez pas pourquoi pas à gauche c'est comme ça -. Mais ces yeux avait lentement dérivés vers la gauche - voilà vous êtes contents? - en direction du jeune homme et sa bouche s'était légèrement entrouverte. Quand elle vit son sourire en coin. C'est bon. Ces lèvres se rejoignirent à nouveau et formèrent un tout petit sourire pendant que Shinoe lui disait que rien n'était vrai. Elle? Crédule? Juste un peu alors. (u.u')

-"Tu as de la chance et encore un peu j'appelais la police."

Vous l'aurez deviné elle disait ceci sur le ton de la plaisanterie. Quoique... Qui sait si tout cela avait été vrai. Enfin déjà elle aurait du y penser et c'est plus simple d'y réfléchir quand ça ne nous arrive pas réellement. Dans l'autre cas il aurait eu tout le temps nécessaire pour la tuer et laisser son corps pourrir quelque part à la merci des bêtes et de toutes sortes d'autres choses qu'il vaudrait mieux ne pas nommer. Bon forcément là elle imaginait le pire. Pourquoi déplacer son corps. Se serait se fatiguer en plus. Bref. Ce n'est pas qu'écouter les diverses possibilités de meurtres dont elle aurait pu être la victime n'était pas intéressant mais, disons, qu'on pouvait trouver mieux. Quand elle redescendit de planète délire - sans commentaire - elle remarqua que Shinoe la regardait et elle croisa un court instant son regard vert. Ses yeux étaient profonds, envoûtant presque et elle n'avait jamais vu une telle nuance de vert dans les yeux de tout autre personne.

Le jeune homme sembla lui aussi plongé dans ses pensées. Tiens étrange. Le jeune homme. Elle l'appelait comme ça mais celui-ci était en réalité plus vieux qu'elle. Mais d'un autre côté... Elle se voyait mal l'appeler le viel homme. Il était encore trop jeune pour avoir droit à ce statut - en même temps vous me direz, jeune homme convient parfaitement là où cette interpellation correspond en réalité à une tranche d'âge bien spécifique et non au fait que la personne soit plus jeune mais que voulez vous... Ca lui fait bizarre -. Elle laissa son regard dérivé sur Shinoe. Elle aimait bien le regarder pendant que celui-ci était perdu dieu seul sait où - enfin a part le concerné bien évidemment -. Elle posa ses bras sur le comptoir et posa sa tête dessus en le regardant. Il était plutôt pas mal elle devait l'avouer mais ce n'était pas son genre de regarder les garçons. Elle était assez occupée et n'en prenait jamais le temps. Une joie pour sa mère. Oui bien sûr elle avait eu quelques relations par le passé mais elle se comptait sur les doigts d'une main, bon peut-être deux mais c'était juste. Et après fallait voir le peu de temps qu'elle tenait avec. Ce n'était simplement pas les bons voilà tout. Elle le regardait d'un air peut-être un peu trop tendre qu'elle se chargea de changer quand celui-ci refît surface. Elle lui souriait simplement.

Si c'était ennuyant? Non pas vraiment. Elle n'avait jamais vraiment réfléchi à ça. En fait personne ne lui avait jamais demandé et elle en première. Elle avait toujours quelque chose à faire et même si parfois ils manquaient de clients, ce n'était jamais le travail qui manquait. Par exemple en ce moment. Après l'un des règlements de compte qu'il y a eu près d'ici cette année - en réalité il en a très souvent mais ils ne sont pas tant touchés par eux - une partie du toit est à refaire. Sans oublier le ménage des chambres au cas où il y aurait d'éventuels clients. Sans compter la vaisselle, la lessive et les courses qu'il fallait faire. Enfin tout été toujours planifié à l'avance. Quand on gérait un commerce - ou un rest'hôtel dans ce cas là - il y avait toujours quelque chose à faire. Et si, au grand Damn de l'ennui, il n'y aurait à faire ici, il y aurait toujours un voisin ayant besoin d'un coup de main - solidaire, hein? Mais on gagne souvent quelque chose en retour même si on espère rien (=p) -.

-"Et bien je n'ai jamais ressenti d'ennui en particulier. J'ai toujours vécu de la sorte. Et puis on est peut-être dans un quartier assez reculé c'est vrai mais on a toujours des clients à l'intérieur. Des habitués. D'ailleurs si tu remarques bien toutes nos chambres sont prises. Et si jamais il n'y personne il reste le toit à réparer."

D'ailleurs c'était plutôt à elle de demander si lui ne s'ennuyait pas trop. Après tout il lui avait dit qu'il sortait pour s'occuper l'esprit, donc quand il n'avait rien à faire - vous voyez qu'elle peut aussi être intelligente! Mwahahahah *hum* pardon... -. Hors vu l'état de ses vêtements, qu'il portait en ce moment même - je vous jure - Shinoe ne venait pas de sortir.

-"Et ta vie à toi t'est-elle des plus passionnantes?"

Tout en disant cela elle s'était levée et s'approcha de la porte d'entrée. Elle venait de se souvenir qu'elle ne l'avait toujours pas fermée alors qu'ils avaient fermé boutique depuis maintenant longtemps. Non qu'une visite surprise comme celle de Shinoe la dérange particulièrement mais quand même la laisser ouverte toute la nuit n'était peut-être pas la meilleure chose à faire. Miyouki ferma tous les verrous - il y en avait quand même quelques uns, cinq pour être précis, ah non six -. Ca pouvait parraitre un peu exagéré mais les nuits n'étaient pas très sures. Enfin ce qu'appelait le système humain la nuit. Il ne fait jamais totalement noir ici mais on y voit pas vraiment plus pour autant. Ni jour ni nuit, un crépuscule éternel. Elle retourna vers Shinoe et tira un seul et petit coup sur sa manche - sans lui déchiré vous en fait pas! Doucement, doucement... -. Elle lui montra d'un signe de tête les escaliers.

-"On devrait monter. On continuera la-haut si ça ne te dérange pas."

Elle attendit sa réponse avant de bouger. Sans raison particulière non. Juste comme ça.

» Un belle journée ! (libre) =) pas finit =(((